Commissions, sur-commissions, sous-commissions, rétro-commissions (de courtage, co-courtage, sous-courtage, auto-courtage … ), avantages en nature, honoraires, dons, subventions … , la diversité des termes employés dans les contrats d’assurance et conventions annexes rend compte de l’opacité des modes de rémunérations pratiqués en matière d’assurance. Ces rémunérations, assises directement ou indirectement sur une prime d’assurance, sont versées à des intermédiaires, professionnels ou profanes de l’assurance, en contrepartie d’une activité réelle ou supposée d’intermédiation en assurance. Qu’un procureur de l’Etat de New York mette à jour le scandale des sur-commissions du courtage ou qu’un décret français étende l’assiette de calcul de la participation bénéficiaire des assurances-vie … et la question de la licéité des rémunérations en assurance réapparaît. Ce syndrome chronique n’est cependant pas surprenant puisque la rémunération est au cœur des préoccupations d’un législateur animé d’une double quête de transparence et de protection des intérêts du consommateur.
Dans ce contexte, la réforme européenne de l’intermédiation en assurance apporte une pierre angulaire à l’édifice réglementaire en posant pour la première fois une définition exhaustive de ce que constitue désormais une « rémunération d’intermédiation en assurance ». Les rémunérations qui ne pourront être qualifiées d’intermédiation devront résulter de contrats de prestations de services distincts dont il conviendra de définir la nature et d’apprécier la licéité.
Cette définition permettra-t-elle d’éclairer le débat actuel sur le sort de participations bénéficiaires conservées par les établissements de crédit, souscripteurs de contrats d’assurance collectifs? il est permis d’en accepter l’augure.
I -QU’EST-CE QU’UNE REMUNERATION D’INTERMEDIATION EN ASSURANCE?
1. Une définition légale exhaustive
La rémunération d’intermédiation d’assurance désigne les sommes perçues par un intermédiaire en assurance en contrepartie de son activité d’intermédiation.
La simplicité apparente de cette définition était trompeuse sous l’empire de la réglementation antérieure à la transposition en France de la directive intermédiation en assurance du 9 décembre 2002 dans la mesure où le terme d’intermédiaire en assurance et a fortiori de rémunération d’intermédiation, n’étaient pas réglementaires.
La rémunération d’intermédiation en assurance regroupait en pratique les rémunérations perçues par les personnes qui effectuaient une activité de présentation de contrats d’assurance au sens de l’ancien article R. 511-1 du Code des assurances et qui agissaient soit en qualité d’intermédiaire professionnel, soit en qualité d’intermédiaire « dérogataire ».
Il existait donc une grande diversité de qualification des rémunérations, tenant d’une part à la catégorie de chaque intermédiaire (commissions de courtage pour le courtier, d’agence pour l’agent général ou de rémunération de mandat pour le mandataire dit de 4″ catégorie) et d’autre part à la qualification parfois incertaine du contrat d’intermédiation lui-même (le contrat de courtage est-il un contrat de mandat, de commission, de représentation commerciale ?).
Par ailleurs, la qualification de la rémunération de l’activité de gestion de garanties d’assurance nécessitait au préalable de déterminer la qualité au titre de laquelle cette gestion était effectuée en qualité de courtier de l’assuré, il s’agissait d’une commission de courtage du par l’assuré et versée par l’assureur, en qualité de mandataire de l’assureur, il s’agissait d’honoraires de gestion dus et versés par l’assureur. ..
La directive intermédiation en assurance a mis un terme à cette hétérogénéité en définissant de façon générale et exhaustive le statut de l’intermédiaire en assurance (les précédentes catégories d’intermédiaires professionnels -agent général, courtier en assurance … -devenant des « sous-catégories » du nouvel intermédiaire réglementé) et de façon précise la rémunération d’intermédiation en assurance.
La nouvelle définition de la rémunération d’intermédiation doit être appréhendée au regard de la nature de la rémunération, de la qualité du bénéficiaire et de la prestation d’intermédiation réalisée.
Ces trois éléments constitutifs nécessitent d’être appréhendés distinctement afin de définir précisément ce que constitue une rémunération d’intermédiation.
1.V. J. BIGOT, Traité de droit des assurances, t. 2, L’intermédiation d’assurance, 2″ éd., LCDJ, 2009, n° 706 et s.
En premier lieu, s’agissant de la nature de la rémunération, l’article R, 511-3 1 du Code des assurances précise qu’elle « doit s’entendre comme tout versement pécuniaire ou toute autre forme d’avantage économique convenu et lié à la, prestation d’intermédiation ». Le nouveau dispositif englobe dès lors toutes les rémunérations, directes ou indirect, pécuniaires ou en nature dans la qualification de rémunération d’intermédiation. Ainsi, des contreparties indirectes, tels des avantages en nature, peuvent constituer des rémunérations d’intermédiation obligeant leur bénéficiaire à revêtir la qualité d’intermédiaire en assurance.
Le droit social donne une idée précise de la diversité de ce qui peut être qualifié de rémunération, en soumettant aux cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales les rémunérations suivantes: « toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l’entremise d’un tiers à titre de pourboire. »
Les applications des avantages en nature, contreparties d’une activité d’intermédiation en assurance ne sont pas rares et constituent par exemple des technique d’animation de réseau de vente : à titre d’exemple les voyages offerts aux meilleurs vendeurs de contrats d’assurance d’un réseau. Ainsi, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt de rejet du 18 octobre 2005 que les voyages offerts gratuitement par un employeur à ses salariés en contrepartie d’un travail effectué étaient soumis à cotisations.
En deuxième lieu, la rémunération d’intermédiation doit être définie au regard de la qualité de son bénéficiaire : « la rémunération allouée au titre de l’activité d’intermédiation ne peut être rétrocédée en totalité ou en parte qu’à l’un des intermédiaires mentionnés au I de l’article R. 511-22 ».
Les catégories de personnes habilitées à exercer une activité d’intermédiation en assurance sont celles énoncées à l’article R. 511-2 du Code des assurances (courtier, agent, mandataire d’assurance, mandataires d’intermédiaire d’assurance, salariés commis à cet effet par des intermédiaires d’assurance et intermédiaires enregistrés sur un registre d’un autre Etat membre). Un régime dérogatoire est toutefois aménagé, supprimant ainsi les précédents régimes dérogatoires issus des anciens articles L 512-2 et s., permettant à des personnes ne revêtant pas la qualité d’intermédiaire habilité d’effectuer des prestations d’intermédiation à litre onéreux (art, R. 513-1 du Code des assurances).
Au titre de ce régime dérogatoire, les personnes exerçant une activité d’intermédiation accessoire à leur activité, dès lors que les contrats d’assurance concernés satisfont à cinq conditions cumulatives, peuvent effectuer des prestations d’intermédiation et être rémunérées pour ce faire, sans avoir à respecter aucune réglementation.
La question se pose cependant d’apprécier la qualification de cette rémunération perçue au titre de ce régime dérogatoire. Les termes de la loi ne sont pas d’un grand secours pour qualifier cette rémunération dès lors que l’article R.513-1 du Code des assurances dispose que « les obligations du présent livre ne s’appliquent: pas aux personnes offrant des services d’intermédiation en assurance de manière accessoire… ». Au titre de ces obligations figure l’obligation de rétrocession de la rémunération d’intermédiation à un intermédiaire en assurance agréé (art. R. 511-3.-ll du Code des assurances). Cette obligation n’étant pas applicable à l’intermédiation à titre dérogatoire, la rémunération perçue au titre de cette activité peut également être rémunérée par une rémunération d’intermédiation.
En troisième lieu, la rémunération d’intermédiation doit avoir pour cause exclusive une activité d’intermédiation. Le nouvel article L. 511-1.-1 dispose à ce titre que « L’intermédiation en l’assurance ou en réassurance est l’activité qui consiste à présenter; proposer ou aider à conclure des contrats d’assurance ou de réassurance ou à. réaliser d’autres travaux préparatoires à leur conclusion. N’est pas considérée comme de l’intermédiation en assurance ou en réassurance l’activité consistant exclusivement en la gestion, l’estimation et la liquidation des sinistres.Est un intermédiaire en assurance toute personne qui, contre rénumération, exerce une activité d’intermédiation en assurance ou en réassurance. »
Au regard de cette nouvelle définition légale de l’activité d’intermédiation, force est de relever que la rémunération des activités de gestion, d’estimation et de liquidation des sinistres non précédée d’une activité d’intermédiation constitue le prix d’une prestation de services (honoraires) ne pouvant être qualifiée de rémunération d’intermédiation.
Par ailleurs, l’article R. 511-2-I 4e, 2e al. dispose que « l’activité des personnes visées aux 3e et 4e du présent article [mandataire d’assurance et mandataire d’intermédiaire d’assurance][…] est limitée à la présentation, la proposition ou l’aide à la conclusion d’une opération d’assurance […] et éventuellement à l’encaissement matériel des primes ou cotisations, et, en outre, en ce qui concerne l’assurance sur la vie et la capitalisation, à la remise matérielle des sommes dues aux assurés ou bénéficiaires ». Dès lors, les mandataires d’assurance et mandataires d’intermédiaire d’assurance ne peuvent effectuer des activités de gestion, d’estimation et de liquidation des sinistres, même précédées d’une autre activité d’intermédiation en assurance et ne peuvent en conséquence être rémunérés pour ce faire.
En outre, l’article R. 511-1 complète la définition légale en précisant que « Les travaux préparatoires à la conclusion d’un contrat mentionnés à l’article L.511-1 s’entendent comme tous travaux d’analyse et de conseil réalisés par toute personne physique ou personne morale qui présente, propose ou aide à conclure une opération d’assurance. »
Il résulte de cet article que ne constitue pas une rémunération d’intermédiation le prix des travaux préparatoires à la conclusion d’un contrat lorsqu’ils sont réalisés par une personne qui ne présente pas, ne propose pas ou n’aide pas à conclure une opération d’assurance.
Enfin, l’article R. 511-1 précise que ne constituent pas des travaux préparatoires, « les activités consistant à fournir des informations ou des conseils à titre occasionnel dans le cadre d’une activité professionnelle autre que celle mentionnée à l’alinéa premier ». Ainsi, la délivrance d’informations ou de conseils portant sur un contrat d’assurance mais réalisée à titre occasionnel dans le cadre d’une activité professionnelle autre que l’intermédiation en assurance ne peut pas non plus être rémunérée par une rémunération d’intermédiation en assurance.
Pour conclure sur la cause de la rémunération d’intermédiation en assurance, la question de la nullité de cette rémunération pour absence de cause pourrait se poser, s’agissant des sommes perçues par un intermédiaire en assurance qui n’effectuerait pas d’activité d’intermédiation en assurance. Pensons par exemple aux sociétés de courtage captives de groupes industriels pour les risques propres de ces derniers ou celles des sociétés de distribution de biens de consommation. La question vaut dans les mêmes termes pour les sommes perçues par les établissements de crédit au titre des contrats d’assurance groupe emprunteurs (infra, II, B, 1). En cas de qualification de ces sommes en rémunération d’intermédiation, la question de leur licéité se poserait. La cause de cette rémunération pourrait toutefois être justifiée par la mise en relation, même indirecte, d’une clientèle. En cas d’illicéité, il conviendrait de procéder à une requalification de ces sommes qui ne seraient plus versées au titre d’un contrat d’intermédiation mais d’un autre contrat de prestation de services, contrat de location de fichier par exemple.
B. Le libre montant de la rémunération d’intermédiation?
Par application du principe général de liberté du commerce et de l’industrie et en l’absence de réglementation spécifique relative au montant de l’intermédiation en assurance, celui-ci est libre, fixé de gré à gré entre les parties. II ne semble donc pas contestable dès lors que le consentement des parties au contrat d’intermédiation a été éclairé et n’a pas été vicié.
La question se pose toutefois de déterminer l’existence d’un éventuel pouvoir judiciaire de révision du montant de la rémunération d’intermédiation proche par exemple de celui applicable en matière de clause pénale, ou d’un droit à rescision judiciaire pour lésion comme en matière de partage ou de vente4?
Suivant une tradition remontant aux anciens Parlements qui contrôlaient et révisaient les conventions d’honoraires des hommes de loi et des agents d’affaires, la jurisprudence reconnaît parfois aux tribunaux le pouvoir souverain de réduire la rémunération promise à un mandataire en tenant compte des circonstances de la cause et des services rendus.
Ainsi, la Cour de cassation, à propos d’un comptable agréé, a posé en principe « que les tribunaux peuvent, quand une convention à été passée en vue de l’exécution de travaux donnant lieu à honoraires, réduire ces derniers lorsqu’ils paraissent exagérés5… ».
Le plus souvent, les tribunaux prennent seulement en considération « le rapport de l’importance des soins, démarches et peines des mandataires, avec l’importance de la rémunération convenue» et se bornent à apprécier les frais exposés et la portée de l’intervention. La réduction des rémunérations résulte ainsi d’une appréciation judiciaire de la valeur objective de la prestation fournie au regard de son prix. La réduction trouve ainsi sa cause dans la lésion au sens technique du terme.
Appliquée à la rémunération d’intermédiation en assurance, une révision du montant de la rémunération d’intermédiation en assurance n’est pas à exclure, même si aucune jurisprudence n’existe à notre connaissance en matière d’assurance, dans le cas où le montant de la rémunération est jugé disproportionné par rapport à la prestation d’intermédiation réalisée.
Cette question revêt une importance spécifique sous l’empire de la nouvelle réglementation de la rémunération d’intermédiation en assurance dans la mesure où, à la différence de la réglementation précédente, l’intermédiation en assurance à titre gratuit n’est pas réglementée.
Dès lors, la tentation est grande, afin d’éviter de soumettre des réseaux de distribution salariés à la réglementation contraignante de l’intermédiation en assurance, de créer un intermédiaire en assurance ad hoc, une sorte de «coquille vide », qui serait seule bénéficiaire de la rémunération d’intermédiation et de ne pas rémunérer le réseau salarié au titre de leur activité de distribution d’assurance.
Une nouvelle fois, l’attribution de rémunérations d’intermédiation par l’intermédiaire ad hoc pourrait être sanctionnée pour absence de cause ou, à tout le moins, être exposée à être révisée.
C. Les modalités de calcul de la rémunération d’intermédiation
- Principe: application d’un pourcentage sur la prime d’assurance
Traditionnellement, la rémunération des intermédiaires d’assurance prend la forme d’un commissionnement, exprimé en pourcentage des primes lui servant d’assiette. On observe communément une indépendance entre le montant de la commission d’intermédiation et les résultats techniques d’un contrat d’assurance, qui peut se révéler déficitaire. Cette indépendance se justifie par le caractère aléatoire d’un contrat d’assurance et le fait que la rémunération à pour cause essentielle l’apport d’un nouveau contrat, quel que soit le résultat technique de celui-ci. Le calcul du taux de prime technique incombe au seul assureur qui est seul responsable de ses erreurs d’appréciation du risque.
Cette indépendance entre rémunération d’intermédiation et résultat technique ne résulte cependant pas d’une disposition d’ordre public, et la question se pose dès lors de déterminer la licéité d’une rémunération d’intermédiation simplement déterminable dès la conclusion du contrat, en fonction du résultat technique de celui-ci et déterminée exclusivement au terme du contrat d’assurance.
- Exception : calcul de la commission en fonction des résultats techniques du contrat
Une commission d’intermédiation indexée en tout ou partie sur les résultats techniques du contrat d’assurance (par définition inconnus lors de la conclusion dudit contrat) serait-elle licite? Autrement dit, un assureur pourrait-il consentir à un intermédiaire en assurance une commission aléatoire en fonction par exemple du rapport sinistre à prime du contrat d’assurance?
Résultant d’un accord contractuel, la licéité d’une rémunération d’intermédiation aléatoire ne semble pas contestable dès lors qu’elle ne porte pas atteinte aux droits des assurés. Or, tel est le cas lorsque cette rémunération participe des postes de charges du compte de résultat et n’est pas issu d’un solde créditeur de compte de résultat.
Il est vrai que l’octroi d’une rémunération d’intermédiation aléatoire pourrait minorer le montant de la participation bénéficiaire des assurés. Cette minoration est-elle de nature à remettre en cause la licéité de la rémunération d’intermédiation aléatoire? Il convient ici de bien distinguer ce qui ressort du solde des résultats techniques du contrat d’assurance (marge bénéficiaire de l’assureur après établissement du compte de résultat et/ou éventuelle participation bénéficiaire des assurés) des éléments constitutifs de ces résultats, notamment la commission d’intermédiation, en l’espèce aléatoire.
La rémunération d’intermédiation, fixe et/ou aléatoire, se distingue de la participation bénéficiaire par sa cause : l’apport d’affaires et/ou la gestion de contrats d’assurance pour l’un, le versement d’une prime trop élevée pour couvrir un risque pour l’autre. Etant sans incidence sur l’obligation de reversement de la participation bénéficiaire due aux adhérents dès lors que le mode de calcul de la rémunération d’intermédiation a été accepté lors de la conclusion du contrat d’assurance, l’attribution d’une rémunération d’intermédiation indexée en tout ou partie sur les résultats techniques du contrat ne semble se heurter à aucune interdiction et serait donc licite. Cette indexation pourrait même s’analyser comme une prime à la qualité de l’apport du contrat, une sorte de sur commission au bon risque présenté.
1. La durée du droit à rémunération d’intermédiation
La rémunération d’intermédiation en assurance ne constitue ni plus ni moins que le prix d’un contrat de prestations de services. Toutefois, tenant compte de la spécificité de l’activité réglementée d’intermédiation en assurance, les contrats de services afférents aux contrats d’assurance sont soumis à des droits spécifiques, obligatoires ou supplétifs. Ainsi les agents généraux d’assurance exercent leur activité en exécution de traités de nomination partiellement régis par des accords professionnels. Les courtiers en assurance, quant à eux, sont soumis aux usages du courtage en assurance, auxquels il est possible de déroger par convention. Lorsque ces courtiers sont membres de l’Association pour le management des risques et assurance en entreprise (AMRAE), ils sont soumis à la charte AMRAE/FCA conclue en 2006 entre la FCA et l’ AMARE.
La nouvelle définition unique de l’intermédiation en assurance ne supprime pas l’application de ces accords professionnels et usages en présence du maintien des catégories précédentes d’intermédiaires en assurance (agent général, courtier…). S’agissant plus spécifiquement de la durée du droit à rémunération de l’intermédiaire, celle-ci est fixée dans le contrat d’intermédiation en exécution duquel l’intermédiaire intervient.
La durée du droit à rémunération de l’agent général continue à être fixé dans le traité de nomination. Cette durée prend fin soit à la date de résiliation du contrat d’assurance soit à la date de cessation du traité de nomination, le droit à commission est alors fixé par indemnité compensatrice ou de cession du portefeuille.
Pour le courtier, le contrat de courtage ou les usages du courtage (droit supplétif) fixe la durée du droit à rémunération. Sauf convention contraire, celui-ci prend fin à la date de cessation du contrat d’assurance sous réserve en cas de reprise du contrat par un autre intermédiaire du respect des usages n° 3 et : n°7 du courtage (ordre exclusif de remplacement, résiliation du contrat, information préalable du courtier quant à la reprise du contrat).
Enfin, la durée du droit à rémunération du mandataire d’assurance (personne physique) est fixée dans le contrat de mandat ou à défaut par le droit commun du mandat (sous réserve de l’application du droit du mandat d’intérêt commun). Cc droit à commission cesse le jour de la révocation du contrat de mandat, sauf en cas d’abus de droit de révocation et d’application de qualification du contrat en mandat d’intérêt commun.
La réforme de l’intermédiation ne remettant pas en cause ces précédentes catégories d’intermédiaire, la durée du droit à rémunération des intermédiaires semble devoir continuer à être fixée de la sorte. Qui cependant de la durée du droit à rémunération des deux nouvelles catégories d’intermédiaire en assurance : les mandataires d’assurance et mandataires d’intermédiaire d’assurance? À l’instar des mandataires d’assurance (personnes physiques), cette durée semble devoir être fixée, en l’absence de régime spécifique applicable aux mandataires d’assurance, par le droit commun du mandat, sauf dérogation conventionnelle.
2. Les rémunérations ne constituant pas des rémunérations d’intermédiation
Les rémunérations attribuées à l’occasion de la conclusion d’un contrat d’assurance mais ne répondant pas à la définition réglementaire de rémunération d’intermédiation peuvent être qualifiées différemment, en exécution de contrats de prestations de services étrangers au contrat d’intermédiation. Ces rémunérations n’obligeront pas leurs bénéficiaires à respecter la réglementation sur l’intermédiation en assurance.
1. Commission d’apport au titre de /’indication en assurance
Distincte de l’intermédiation en assurance, l’indication est l’activité qui se borne à la mise en relation d’un candidat à l’assurance et d’un assureur (ou d’un intermédiaire en assurance). L’indication peut être exercée par tout intervenant économique sans avoir à respecter de réglementation spécifique. Déjà présente sous l’empire de la réglementation antérieure à la transposition de la directive intermédiation en assurance, cette activité non réglementée est toujours consacrée par le nouveau dispositif intermédiation en assurance.
En principe, l’indicateur peut être librement rétribué au titre de cet apport. Le principe de libre rétribution de l’indication, issue de l’abrogation de l’article A. 335-18 du Code des assurances, doit toutefois être relativisé en raison du risque de requalification de la rétribution d’indication en commission d’intermédiation si le montant s’avère trop élevé.
En revanche, le droit de perception de rétributions d’indication, mis à mal au cours de la procédure de transposition de la directive intermédiation en assurance, n’est in fine pas remis en cause. L’indicateur peut percevoir une rétribution d’indication récurrente, justifiée par l’apport du contrat. Cette rétribution, indépendamment de la durée du contrat d’assurance est assise et due en l’absence de dispositions contraires, tout et autant que des primes d’assurance sont versées, au titre du contrat « indiqué ». A ]’occasion d’un arrêt rendu le 11 mars 20036, la Cour de cassation confirme d’ailleurs que les parties sont libres de fixer les modalités de la rémunération de l’indicateur de sorte que rien n’interdit la rétribution de la prestation instantanée de mise en relation par le versement d’une commission récurrente.
2.Honoraires de gestion exclusive des sinistres et d’audit
L’activité exclusive de gestion des sinistres ne constitue pas une activité d’intermédiation en assurance réglementée et peut en conséquence donner lieu à une rémunération du prestataire en honoraires et non en rémunération d’intermédiation. Le droit à honoraire existe tant que dure le mandat de gestion, étant précisé qu’en l’absence de disposition contraire et sous réserve de l’abus de droit de révocation, celui-ci est révocable ad nutum.
Au surplus, la nouvelle définition de l’activité réglementée d’intermédiation en assurance ne semble pas concerner la réalisation de travaux d’analyse de programmes d’assurance. Dès lors, les travaux d’audit de contrats d’assurance semblent pouvoir donner lieu à l’octroi d’honoraires à leurs auteurs, indépendamment de tout contrat d’assurance.
3. Remboursement de frais et rémunération d’activités d’animation et/ou de formation
Les frais de gestion remboursés par des entreprises d’assurance ou des intermédiaires en assurance ne peuvent être qualifiés de commission d’intermédiation. Il en est de même des activités d’animation de réseaux de distribution de contrats d’assurance (ou d’animation de portefeuilles d’assurés ou adhérents) ou de formation, qui semblent indépendantes d’une activité d’intermédiation en assurance, pouvant donc être rémunérées en honoraires.
4. Loyers en cas de location de fichiers
La conclusion de contrats de location de fichier trouve de plus en plus d’applications dans la distribution de contrats d’assurance affinitaires. En pratique, un prescripteur (enseigne commerciale) société d’édition, opérateur en téléphonie mobile…) loue à une entreprise d’assurance ou à un intermédiaire en assurance son fichier de clients afin que le locataire exploite celui-ci en proposant aux prospects, souvent à distance (courrier postal et/ou électronique et vente par téléphone), la souscription de contrats d’assurance.
La location du fichier donne lieu à versement d’un loyer au loueur qui n’a pas à revêtir la qualité d’intermédiaire en assurance, dès lors que les loyers ne sont pas qualifiés en commission d’intermédiation. À l’instar de la rétribution d’indication en assurance, le loyer des contrats de location n’est pas soumis aux usages du courtage en assurance.
Il – LA PARTICIPATION BÉNÉFICIAIRE DES ASSURANCES GROUPE EMPRUNTEURS PEUT·ELLE ÊTRE REQUALIFIÉE EN RÉMUNÉRATION D’INTERMÉDIATION?
Afin de faire bénéficier leurs clients emprunteurs, les établissements de crédit (banque et sociétés financières) souscrivent auprès de compagnies d’assurance des contrats d’assurance groupe régis par les articles L. 141-1 et s. du Code des assurances. Les clients des établissements de crédit ayant souscrit auprès de ceux-ci un contrat de prêt et désireux de bénéficier de garanties d’assurance pour couvrir leurs prêts (en cas de décès, invalidité, incapacité de travail et perte d’emploi le cas échéant), adhérent au contrat d’assurance de groupe. Les établissements de crédit revêtent souvent la double qualité de souscripteur des contrats d’assurance de groupe et d’intermédiaire en assurance.
En qualité d’intermédiaire en assurance (activité de présentation des adhérents et/ou de gestion des garanties), les établissements de crédit sont traditionnellement rémunérés en amont du contrat, par des commissions de courtage assises sur les primes d’assurances versées par les adhérents et parfois en aval, par une rémunération aléatoire calculée en fonction des résultats techniques de l’opération d’assurance, rémunération souvent dénommée contractuellement « participation bénéficiaire ».
La licéité de cette rémunération indirecte des établissements de crédit fait l’objet d’un vif débat7 : les sommes perçues à ce titre ne sont-elles pas destinées à être reversées aux adhérents des contrats groupe emprunteurs, seuls débiteurs des primes d’assurance? Le débat renaît aujourd’hui après la promulgation d’un arrêté du 23 avril 2007 qui a étendu l’assiette de calcul de la participation bénéficiaire aux garanties décès des assurances de groupe, notamment aux assurances groupe emprunteurs.
La question posée ici est de déterminer si les sommes perçues par les établissements de crédit en fonction des résultats techniques des contrats constituent in fine des rémunérations d’intermédiation au sens de la nouvelle définition, malgré leur qualification contractuelle de participation bénéficiaire?
1. La participation bénéficiaire ne peut juridiquement bénéficier aux souscripteurs de contrats groupe
1. L’attribution d’une participation bénéficiaire nécessite la qualité d’assuré
En application de l’article L. 331-3 du Code des assurances, les entreprises d’assurance sur la vie doivent faire bénéficier leurs assurés des bénéfices techniques et financiers. L’octroi de ces participations bénéficiaires constitue une obligation légale qui est la contrepartie équitable de règles tarifaires prudentielles.
Cette participation bénéficiaire résulte de la qualité d’assuré par simple application de la règle d’équité. Le souscripteur du contrat d’assurance peut également: être le bénéficiaire de la participation bénéficiaire, dès lors toutefois qu’il dispose de la qualité d’assuré. En revanche, la rémunération d’intermédiation ne peut être octroyée qu’aux seules personnes qui effectuent une activité d’intermédiation, telle que définie à l’article R. 511-1 du Code des assurances8
2. Le souscripteur d’un contrat d’assurance groupe ne revêt pas la qualité d’assuré
L’éventuelle attribution des bénéfices aux établissements de crédit ne se concevrait que si ces derniers pouvaient bénéficier de la qualité d’assuré. Deux hypothèses pourraient être envisageables afin de conférer à l’établissement de crédit, outre sa qualité de souscripteur, la qualité d’assuré.
D’une part, une requalification du risque couvert par le contrat pourrait tout d’abord être proposée: en soutenant que rétablissement de crédit est non seulement souscripteur mais également assuré contre le risque d’«insolvabilité». Cependant, les règles techniques relatives à l’organisation des entreprises d’assurance s’opposent à une telle solution. D’autre part, il serait aussi possible de soutenir que l’assurance de groupe s’analyse juridiquement comme une assurance pour compte, ce qui permettrait à l’établissement de crédit de bénéficier de la double qualité de souscripteur et d’assurer. Mais cette solution ne résiste pas à l’analyse.
3. Absence de qualité d’assuré contre le risque d’insolvabilité de l’adhérent
Classiquement, l’assuré est la personne, physique ou morale, qui court le risque contre lequel le contrat d’assurance permet d’être garanti. Dans ces conditions, si l’on se réfère à la garantie décès, l’assuré ne peut être que l’emprunteur, personne physique.
Toutefois, une autre alternative serait de considérer autrement le risque couvert eu égard à la philosophie de l’opération.
En effet, la souscription de l’assurance de groupe emprunteurs a pour but de fournir à l’établissement de crédit un débiteur solvable en cas de défaillance de l’emprunteur. Ce faisant, l’établissement de crédit cherche à se protéger contre un risque d’insolvabilité ou, pour reprendre les termes utilisés par le professeur Bigot, «à assurer la bonne fin financière du prêt9 ». Mais alors, l’assurance changerait de nature et deviendrait une assurance de risques de pertes financières (article R. 321-1-16). Si cette analyse est séduisante, des règles d’ordre technique s’opposent pourtant à cette requalification.
À l’instar du professeur Bigot, il faut rappeler que le principe de séparation juridique des sociétés d’assurance-vie et non-vie empêche les premières de proposer des assurances relevant de la seconde catégorie, sauf si les risques sont considérés comme accessoires, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce (article L 321-1, alinéa 3),
Par ailleurs, la qualification même d’assurance de groupe emprunteurs serait remise en cause. En effet, seuls les risques énumérés à l’article L. 141-1 du Code des assurances peuvent faire l’objet d’une assurance Je groupe au sens du titre 4, et celle-ci ne s’adresse qu’à des personnes physiques. Ce serait donc toute l’économie de l’opération qu’il faudrait repenser, sans pour autant considérer l’établissement de crédit comme assuré au sens de l’article L. 331-3.
La qualification de la garantie ne peut donc être modifiée : elle demeure une assurance-décès dans laquelle seul l’adhérent à la qualité d’assuré, l’établissement de crédit ayant la qualité de bénéficiaire des prestations
4. Absence de qualité d’assuré au titre d’un contrat d’assurance pour compte
La nature juridique de l’assurance de groupe n’est pas définie par la loi qui se contente d’édicter des règles de fonctionnement par les articles L. 141-1 et suivants du Code des assurances. Y échappent d’ailleurs pour partie les assurances de groupe emprunteurs qui relèvent du Code de la consommation. Différentes thèses sont dès lors envisageables. L’une d’entre elles est de considérer que l’assurance de groupe repose sur le mécanisme de l’assurance pour compte prévu à l’article L 112-2 alinéa 1er du Code des assurances: «L’assurance peut aussi être contractée pour le compte de qui il appartiendra. La clause vaut, tant comme assurance au profit du souscripteur du contrat que comme stipulation pour autrui au profit du bénéficiaire connu ou éventuel de ladite clause. »
Ce mécanisme de l’assurance pour compte permet d’attribuer la qualité d’assuré au souscripteur, en l’occurrence l’établissement de crédit, et à l’emprunteur (par le biais d’une stipulation pour autrui). Certes, le texte trouve plus fréquemment application en assurance de dommages qu’en assurances de personnes. Mais l’argument n’est pas dirimant puisque celui-ci figure dans le titre 1 du livre 1 regroupant les «règles communes aux assurances de dommages non maritimes et aux assurances de personnes». Il peut encore être objecté que, malgré l’emploi d’une formule impérative, cette double attribution de la qualité d’assuré n’a rien d’obligatoire. En effet, les dispositions de l’article L. 112-1 sont visées par l’article L 112-2 parmi les dispositions à caractère supplétif. Par conséquent, l’assurance pour compte ne conférerait pas nécessairement la qualité d’assuré au souscripteur. En poursuivant un raisonnement par analogie avec les assurances de dommages, terrain privilégié des assurances pour compte, la Cour de cassation considère que le souscripteur d’une assurance pour compte bénéficie également de la qualité d’assuré sauf volonté contraire exprimée dans la police.
Les objections les plus sérieuses résultent du fait que le mécanisme de la stipulation pour autrui, sur lequel repose l’assurance pour compte, est impropre à justifier les relations triangulaires existant entre le souscripteur, l’assureur et l’adhérent-emprunteur. En effet, l’essence même de l’assurance pour le compte de qui il appartiendra consiste dans l’indétermination de l’assuré pour compte au jour de la conclusion du contrat. Or, une telle caractéristique ne se retrouve pas en assurance de groupe. Dès leur intégration dans le schéma d’assurance, les emprunteurs acquièrent la qualité d’assuré. La philosophie n’est donc pas la même dans chacun des procédés : il n’est pas envisageable d’assimiler l’assurance pour compte dans laquelle le risque existe indépendamment de l’assurébénéficiaire, au contrat d’assurance collective où le risque repose sur une personne. Mais surtout, le schéma de l’assurance pour compte ne prend pas en considération le fait que l’adhérent emprunteur est le débiteur final de la prime, l’établissement: de crédit n’en étant que le collecteur. Au contraire, l’article L. 112-1, alinéa 2, prévoit que «le souscripteur d’une assurance pour le compte de qui il appartiendra est seul tenu au paiement de la prime envers l’assureur».
Pour certains, le fait que l’adhérent soit le débiteur final de la prime n’est pas forcément incompatible avec sa qualité de bénéficiaire d’une stipulation pour autrui, la jurisprudence admettant que cette stipulation n’exclut pas, dans le cas d’acceptation par le bénéficiaire, qu’il soit tenu de certaines obligations.
Toutefois, le schéma originel de la stipulation pour autrui s’en trouve trop fortement altéré pour être consacré. Ce qui explique qu’une partie de la doctrine11 préfère consacrer une vision dite éclatée de l’assurance de groupe emprunteurs correspondant mieux à la réalité. Selon cette vision, l’établissement de crédit conclut avec l’assureur un contrat-cadre contenant des stipulations de contrat pour autrui en faveur des emprunteurs. Au contraire de la stipulation pour autrui classique qui crée un droit au bénéfice d’un tiers, il s’agit ici de donner naissance à un contrat d’assurance entre l’emprunteur et l’assureur, dont les termes ont été négociés par la conclusion d’un contrat, cadre ou socle, entre le souscripteur et l’assureur. Par conséquent, en s’éloignant du mécanisme de la stipulation pour autrui, et donc de l’assurance pour compte, les qualités sont nécessairement redistribuées. L’adhérent emprunteur est partie à un contrat d’assurance avec l’assureur et, à ce titre, à non seulement la qualité de débiteur des primes mais également d’assuré. Par ailleurs, l’établissement de crédit est le souscripteur du contrat-cadre chargé de coordonner les relations adhérents/assureur. Sachant que dans l’hypothèse particulière de la garantie décès, l’établissement de crédit est également désigné par l’adhérent comme bénéficiaire des prestations.
Après analyse de la nature juridique de l’assurance groupe emprunteurs, il s’avère qu’il n’est juridiquement pas possible de faire bénéficier le souscripteur d’un contrat d’assurance groupe de la qualité d’assuré par le mécanisme de l’assurance pour compte. Seuls les adhérents bénéficient de la qualité d’assuré au titre des contrats d’assurance groupe, et sont donc susceptibles de bénéficier de participations bénéficiaires.
2. La participation bénéficiaire peut être requalifiée en rémunération d’intermédiation des souscripteurs
1.Fondement juridique à la requalification: la commune intention des parties au contrat groupe
La requalification de la participation bénéficiaire en rémunération d’intermédiation des souscripteurs de contrats groupe pourrait résulter de la recherche de la commune intention des parties au contrat d’assurance groupe. Quelles sont ces parties? L’article L 141-1 du Code des assurances donne une définition de ce contrat : « Est un contrat d’assurance de groupe le contrat souscrit: par une personne morale ou un chef d’entreprise en vue de l’adhésion d’un ensemble de personnes répondant à des conditions définies au contrat, pour la couverture des risques dépendant de la durée de la vie humaine, des risques portant atteinte a l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, des risques d’incapacité de travail ou d’invalidité ou du risque de chômage. »
Selon le législateur, les parties à un contrat d’assurance groupe sont bien le souscripteur, en l’espèce l’établissement de crédit et la société d’assurance. La qualité de bénéficiaire acceptant d’une stipulation faite à son profit ne confère par à l’adhérent la qualité de partie au contrat d’assurance groupe. Or, il ne fait pas de doute qu’en qualifiant contractuellement la rémunération d’intermédiation de participation aux bénéfices, le souscripteur et l’assureur ont bien entendu visé une rémunération d’intermédiation aléatoire. Il en est de même de l’absence de volonté des parties de faire bénéficier les adhérents aux contrats groupe d’éventuelles participations aux résultats puisqu’aucune clause de participation n’est stipulée dans les documents d’adhésion.
2. Licéité de la rémunération d’intermédiation des établissements de crédit au regard de la nouvelle définition réglementaire?
La licéité de l’octroi d’une rémunération d’intermédiation au profit des souscripteurs des établissements de crédit semble établie lorsque lesdits souscripteurs effectuent bien des prestations J’intermédiation en assurance et ont qualité pour percevoir ces rémunérations12 . La seconde condition ne soulève pas de difficulté dans la mesure où les établissements de crédit, souscripteurs de contrats d’assurance groupe, revêtent souvent la qualité de courtier en assurance, donc d’intermédiaire habilité.
En revanche, la première condition est sujette à caution, et ce dans deux hypothèses. En premier lieu, une difficulté surviendrait inévitablement lorsque le souscripteur de contrats d’assurance groupe se borne à souscrire le contrat d’assurance groupe sans effectuer aucune prestation d’intermédiation.
En second lieu, une seconde difficulté est susceptible de survenir dans le cas d’une rémunération d’intermédiation dont le montant serait sans rapport avec les prestations d’intermédiation effectivement réalisées par l’intermédiaire. Dans ce cas, la rémunération d’intermédiation serait exposée à un fort risque de révision judiciaire14.
La rémunération d’intermédiation accepte désormais une définition légale exhaustive qui nécessite d’être appréhendée au regard de sa nature, de la qualité du bénéficiaire et de la prestation d’intermédiation réalisée en contrepartie. Le nouveau dispositif permet de définir strictement les seuls bénéficiaires de cette rémunération, soumis ou non (régime dérogatoire) à la réglementation sur l’intermédiation et de qualifier enfin clairement les rémunérations perçues par les gestionnaires de garanties d’assurance : définition unique mais régimes juridiques pluriels, déterminables en fonction de la catégorie à laquelle appartient l’intermédiaire et fixées par le droit commun du mandat et/ou les accords professionnels et usages applicables à chaque catégorie d’intermédiaire (accords des agents généraux d’assurance) usage du courtage, chartes Amrae … ). Dans un souci de cohérence, en tenant compte des spécificités de chaque catégorie d’intermédiaire, une évolution des usages du courtage vers des usages d’intermédiation en assurance serait à ce titre souhaitable, permettant de soumettre la définition unique de la rémunération d’intermédiation à un seul régime juridique. Dans le contexte actuel de tourmente sur le sort des participations bénéficiaires des assurances groupe emprunteur, la nouvelle définition légale de la rémunération d’intermédiation en assurance permet-elle de déterminer si ces participations sont susceptibles d’être requalifiées en rémunération d’intermédiation des souscripteurs? Une chose est certaine : rechercher si les sommes perçues par les établissements de crédit au titre de cette participation bénéficiaire sont destinées in fine aux adhérents ou aux souscripteurs des contrats groupe semble sur le plan juridique un débat de façade dès lors que seul un assuré, qualité que ne peut revêtir le souscripteur d’un contrat d’assurance groupe, peut juridiquement bénéficier d’une participation aux bénéfices.
Toutefois, la volonté des souscripteurs de contrat d’assurance groupe et assureurs de faire bénéficier les souscripteurs de rémunérations complémentaires en fonction des résultats techniques du contrat d’assurance ne semblent pas faire de doute, malgré la qualification approximative de participation bénéficiaire. Force est de constater que l’arrêté du 23 octobre 1995 qui excluait les garanties décès des contrats collectifs de l’assiette de calcul des participations bénéficiaires rendait sans conséquence cette approximation. L’arrêté du 23 avril 2007 étendant l’assiette de calcul des participations bénéficiaires aux contrats d’assurance collectif, conformément cette fois à la loi du 16 juillet 1992, a eu le mérite de poser clairement la vraie question: celle de l’existence de la cause de cette rémunération aléatoire ou à tout le moins celle de l’appréciation du caractère excessif de cette rémunération.
2, . assus., art. R 511-3.-11.
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lnFra, I, F
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C. civ. art. 887 et 1674.
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Cass. civ. 1er, 3 juin 1986, n° 85-10486, Bull. civ. 1, n » 150.
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Cass. civ. 1er , 11 mars 2003, RGDA 2003, p. 567, note ]. BIGOT
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V. J. Blcor, « Contrats emprunteurs: la bombe à retardement?) », ]CP 2005, p. 2144;
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MAYAUX, « La participation aux bénéfices dans les assurances « emprunteurs » : mythe ou réalité?», ]CP 2007, I, 1.84.
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Supra, l, A.
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Paris, 17 juin 1985, RGAT 1985, p. 398, note J. BIGOT
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V. J. KUIJMANN Traité de droit des assurances, t. 4, Les assurances de personnes, dir.
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V. J. BIGOT, traité de droit des assurances, L 111, Le contrat d’assurance, LGD.L 2002, n » 632; L MAYAUX, Traité de droit des assurances, t. 4, Les assurances de personnes, dir. J. BIGOT, LGD.L 2008, n° 816 et s.
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Supra, I, A.
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Sur l’absence de cause de la rémunération d’intermédiation, supn1, 1, A.
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Sur le risque de révision judiciaire de la rémunération d’intermédiation, supra, I, B.
Mélanges en l’honneur du Professeur J. Bigot – Contribution de Pierre Bichot / mai 2010 | Nom de la publication source
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